La méteo des mots

Vivre, tout simplement

Ma première semaine de congés est terminée. Encore quelques jours de répit avant de reprendre le travail. Durant cette semaine, j’ai occupé mes jours à scroller sur mon téléphone (beaucoup), à faire le ménage (tous les jours) et à occuper comme je le pouvais la petite boule d’énergie qui me sert de fille.

J’ai dû mal à lâcher prise.

Quand je le fais, que je me dis que je vais me reposer et enfin profiter, j’ai l’impression que quelque chose d’invisible m’en empêche. Je n’arrive pas à lutter. Les 'il faut" ont la vie dure. Ce sont comme des sangsues dont je ne peux me débarasser. Je suis tiraillée entre profiter de mes vacances (en faisant des choses que j’aime) et m’occuper de la maison, des rendez-vous médicaux et autres tâches qui trainent.

Tout est une question d’équilibre.

Je suis tombée malade une journée. Parfois, j’ai l’intime conviction d’etre allergique à cette maison. Il suffit que je reste plus de quatre jours d’affilé sans aller travailler pour que les symptômes apparaissent : le nez et la gorge qui grattent, les éternuements, le besoin irrespressible d’expectorer… Comme si mon corps essayait de me faire cracher le morceau, la vérité.

Ma place n’est pas ici.

Pour apaiser les symptômes, j’ai ouvert toutes les fenêtre. Avec ma fille, nous sommes sorties au parc plusieurs jours d’affilée. Elle était heureuse. Elle a le contact facile. Quand elle voit des enfants, elle leur tourne autour un moment puis finit par entamer la conversation. L’amitié se crée en quelques minutes. Je serais incapable de faire comme elle. Si elle n’était pas sortie de mon ventre, j’aurais eu du mal à croire qu’on soit lié.

L’allergie est passée, je me sens mieux et j’en suis soulagée. Je ne sais pas trop à quoi cela est dû. La poussière, l’alimentation ou mon corps qui s’est habitué à tourner à plein régime si bien qu’il me le paye cher dès lors que je souhaite me reposer ?

En ce moment, il fait beau. J’ai beaucoup lu. J’ai eu un gros coup de coeur pour Big Girl de Mecca Jamilah Sullivan que j’ai emprunté à la bibliothèque. Je vais l’acheter. Il y a aussi la lecture de la bande dessinée sur Samuel Patty qui m’a beaucoup touchée.

Alors certes, ce ne sont pas les meilleures vacances du monde mais il y a des petits moments de grâce et de joie dont on ne se rend compte qu’après coup. Le soleil. Les rires de ma fille. Lui lire à voix haute des histoires. Lire tous les trois, Kémi, ma fille et moi côte à côte, chacun son livre dans les mains. Danser au son de nos musiques traditionnelles. J’aurais toujours tendance à voir le positif, même si cela ne se voit pas forcément lorsque j’écris ici.

Kémi est en congés depuis samedi. Aujourd’hui, il a emmené la petite chez sa tante où elle passera quelques jours. J’en profite pour écrire ici. Ça fait du bien d’avoir du temps pour soi.

Parfois, je me demande si je l’aime. Je me demande si je l’ai aimé un jour. Vraiment aimé. J’ai l’impression que les choses sont allées vite entre nous sans qu’on se connaisse vraiment. J’ai l’impression, après presque dix ans passées ensemble, que je ne le connais toujours pas.
Je n’ai pas de désir pour lui. Je me demande si c’est normale. Si des couples ont déjà vécu ça. Je me méfie, me demande s’il m’aime véritablement. Peu importe ce qu’il fait, j’ai toujours le sentiment que cela sonne faux.
J’ai envie d’aimer. J’ai envie de ressentir la chair de quelqu’un d’autre contre la mienne. La sienne ? Pas vraiment.

Il a dit qu’on sortirait mercredi. Un date. Il se plaint qu’il n’a pas d’argent. Il m’a partagé son souhait d’arrêter son travail à la fin de l’année scolaire. De faire du mi-temps. Je lui ai fait comprendre qu’il pouvait faire ce qu’il voulait, tant qu’il continuait à prendre en charge ses responsabilités, c’est-à-dire payer sa partie du loyer.

J’essaie de ne pas trop me prendre la tête sur ça. On verra ce que cela donne.
En attendant, il faut (vous voyez, les "il faut" sont partout) que je me prenne en main. Déjà passer mon code. Obtenir mon permis.
L’année prochaine, je retourne au pays pour les vacances.

Je sais qu’un jour j’y retournerai définitivement. Ou bien, je ferai la navette entre ici et la-bàs. Dans ma tête, les balbutiements d’un projet que j’ai appelé "Get out of it", soit en français "Tire-toi de là avant que ça soit trop tard meuf". Ce projet consiste à être suffisamment indépendante (notamment en cas de séparation) et à retrouner vivre sur mon île natale.

En attendant, je suis ici, alors autant en profiter. Ne pas se mettre la pression, facile à dire.

Vivre, tout simplement.